Alexander Gauland : “Nous refusons la poursuite de la fédéralisation de l’Europe”

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Allemagne – Entretien avec Alexander Gauland, président de l’AfD : “Nous refusons la poursuite de la fédéralisation de l’Europe”. Entretien écrit mené par Ferenc Almássy et réalisé par mail début juillet 2017.


Ferenc Almássy : Vous menez l’AfD en vue des élections allemandes de cet automne. Vous êtes opposé à la politique migratoire d’Angela Merkel, considérant que c’est un danger pour l’Allemagne et un non-sens politique. Cependant, les sondages indiquent qu’Angela Merkel sera probablement réélue. Comment l’expliquez-vous ? Quelle est votre stratégie pour ces élections ?

Alexander Gauland : Les résultats électoraux sont influencés par de nombreux facteurs. La politique d’Angela Merkel vis-à-des réfugiés n’est qu’un de ces facteurs. La bonne situation économique de l’Allemagne en est un autre. Qui plus est, les résultats électoraux dépendent de tendances à long terme que des partis d’opposition ne peuvent que difficilement modifier dans un court laps de temps. C’est pourquoi il est tout à fait clair qu’il est difficile d’écarter Angela Merkel du pouvoir, parce que de nombreux Allemands considèrent qu’ils vont encore très bien, qu’ils ne remarquent pas encore tellement les réfugiés et qu’on pourra venir à bout de la crise d’une manière ou d’une autre.

FA : Concernant l’immigration, le premier ministre hongrois Viktor Orbán notamment a exprimé son inquiétude envers d’autres grandes vagues migratoires similaires à celle de 2015. Partagez-vous cette prédiction ? Et que devrait faire l’Allemagne pour contrer cela et gérer l’immigration ?

Alexander Gauland : Je crois que cette prédiction est correcte. Nous assistons déjà à des vagues de réfugiés qui traversent la Méditerranée de Libye en Italie et, comme des démographes l’indiquent, des millions d’hommes attendent au Sud du Sahara de se mettre également en route pour l’Europe. Je crois que Viktor Orbán a touché dans le mille avec ses sombres prédictions. Je ne crois pas pas qu’on puisse gérer une telle immigration. L’intégration nécessite un poids prépondérant de la population autochtone et cette condition serait significativement ébranlée si une autre vague arrivait.

FA : Si Merkel est réélue, les observateurs politiques prédisent la plus forte collaboration franco-allemande depuis la création de l’UE, étant donné que le président français Emmanuel Macron est sur la même longueur d’onde que la Chancelière. Ce sera probablement un grand pas en avant vers la fédéralisation de l’Union européenne. Comment voyez-vous l’avenir dans cette configuration, et quel serait alors le rôle de l’AfD ?

Alexander Gauland : Nous refusons la poursuite de la fédéralisation de l’Europe. Nous ne croyons pas que les États nationaux deviennent superflus et nous ne croyons pas non plus que la France veuille se dissoudre dans l’Europe, aussi peu que l’Allemagne voire même des États plus petits comme les Pays-Bas ou la Pologne.

FA : En parlant de fédéralisation européenne, un autre sujet sur lequel se focalise l’Allemagne est un nouveau type de collaboration européenne : le projet d’Armée européenne. Plusieurs pays tels que les Pays-Bas, la Tchéquie et la Roumanie, ont déjà intégré des troupes sous commandement allemand et certains chefs de gouvernement d’Europe centrale, tel Viktor Orbán, appellent à la réalisation de cette Armée européenne, qui pour ainsi dire serait un OTAN sans la Turquie, le Canada et les USA: Quelle est votre opinion sur ce sujet ?

Alexander Gauland : Nous ne croyons pas qu’il devrait y avoir une armée européenne. L’OTAN demeure la meilleure défense pour l’Occident, car elle regroupe tant le Canada et les États-Unis que les Européens de part et d’autre de l’Atlantique. Toutes les tentatives d’écarter les États-Unis de la défense européenne sont déjà erronées en ce que ceux-ci ne peuvent pas être remplacés par les Européens. À présent encore moins qu’avant le Brexit, car les forces armées britanniques, disposant d’armes nucléaires, ne peuvent plus faire partie d’une telle armée européenne.

FA : Parlons un peu si vous le voulez bien du groupe de Visegrád. Quelle est votre opinion sur cette organisation ? Et comment voyez-vous le rôle de l’Allemagne dans cette région, considérant que la plupart des industries de ces pays sont dominées par des groupes allemands ? Et selon vous, quel devrait être la relation entre le groupe de Visegrád et l’Allemagne ?

Alexander Gauland : Les États du Groupe de Visegrád sont des partenaires importants pour l’Allemagne qui a toujours été bien conseillée de convier des partenaires européens plus petits à ses réflexions et d’accorder sa politique avec ses partenaires que nous considérons comme importants, tant à l’Ouest qu’à l’Est.

FA : Vous êtes connu pour être plus sympathique à l’égard de la Russie que nombre d’élites occidentales. Et si l’Allemagne est souvent qualifiée “d’anti-russe”, les faits montrent que l’Allemagne coopère de plus de plus avec la Russie, le projet du North Stream en étant un bon exemple de cette entente. Comment voyez-vous les relations germano-russe ?

Alexander Gauland : L’Allemagne s’est toujours bien portée lorsqu’elle avait de bonne relations avec la Russie. Cela remonte loin dans l’Histoire. La Prusse a été sauvée en 1763 par un revirement d’alliance de la Russie, et une seconde fois en 1807 par le Traité de Tilsit avec Napoléon. Les Guerres de libération  (1815) n’auraient pas été possibles sans la Russie et l’unification par Bismarck est aussi le fruit d’un renversement d’alliance de la Russie, lâchant l’Autriche pour soutenir la Prusse. Les hommes d’État et monarques allemands ont perdu de vue cette situation après la fin de l’ère bismarckienne et mené l’Allemagne dans une confrontation qui signifiait la guerre, tant à l’Ouest qu’à l’Est. Ce fut une erreur, c’est pourquoi de bonnes relations avec la Russie sont la condition d’une Allemagne forte et sûre. Dans cette mesure, l’expansion de l’OTAN en contradiction avec les accords oraux qui avaient été convenus avec la Russie lors des négociations pour la réunification, est une faute. On ne pouvait modifier l’ordre mondial qu’avec la Russie; on l’a néanmoins modifié contre la Russie et cela a eu pour conséquence la crise de Crimée et la crise ukrainienne. C’est pourquoi les vieilles règles de la politique russo-prussienne, à savoir de bonnes relations avec la Russie comme condition d’une bonne cohabitation en Europe, conservent leur valeur.

 

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